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L'ART QUI BOUGE
5 avril 2011

Abderrahmane Zenati: Conférence à la bibliothèque de l'Institut français à Oujda

 

Rencontre avec l'artiste peintre Abderrahman Zenati à la Médiathèque de l’Institut français de l’Oriental

 

 

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C’est avec fierté qu'aujourd’hui j’observe à Oujda mes nombreux compatriotes écrire et éditer des livres  en langue arabe, française et autres. Il faut rappeler à nos jeunes  que, rares étaient les marocains chez nous, qui savaient lire et écrire... Dans notre ville, et même dans l'ensemble de notre Pays, presque l’ensemble des Marocains étaient complètement analphabètes.

Il faut dire que, dans le domaine de  l’instruction et la culture en général, l’administration française était douloureusement discriminatoire. Elle favorisait volontairement les riches familles algériennes et à l'occasion certaines familles marocaines nécessaires à sa cause en ouvrant des écoles à leurs descendances, tout en laissant le reste du peuple noyer au fond de l’océan de l’ignorance.  

  Je me rappelle qu'il y avait une importante bibliothèque municipale à Oujda… Elle contenait des milliers de livres qui traitaient tous les domaines du savoir, mais, hélas !  Elle était réservée  uniquement aux Français et aux nantis Algériens et Marocains  privilégiés.

  Pour ceux de mon âge, qui se souviennent et pour ceux qui ne le savent pas encore, à Oujda, jusqu’à 1960, nous n’avions aucun médecin marocain, aucun chirurgien, aucun pharmacien, aucun avocat, aucun ingénieur, aucun professeur, aucun commissaire de police, aucun haut fonctionnaire dans l’administration… Tous ces postes étaient occupés par des  Algériens et des Français, pas forcément  de souche… 

 Le premier médecin marocain venu à Oujda c’était en 1961 et ce fut le docteur Mamoun Fassi Fihri avec qui j’ai travaillé comme infirmier à l’hôpital Maurice Lousteau, aujourd'hui, Hopital Al Farabi.

  Pour nous autres Marocains, voir un médecin de chez nous, était un événement, une fierté.  Oui, jusqu' à notre Indépendance, à Oujda, rares étaient les marocains qui savaient lire les ouvrages en langue arabe et française…, encore moins les écrire.   Notre culture n’était qu’un ensemble de transmission orale. C’était juste les contes que narraient les nombreux conteurs à Bab sidi Abdelouahab qui nourrissaient notre imagination et  enrichissaient notre vocabulaire.  C’était des œuvres racontées sans auteur. Pour nous, l’auteur n’était rien.  Les contes, en métamorphose permanente, naissaient, vivaient et se transformaient à l’intérieur de ce lieu vide.   Pour nous  autres à Oujda le fait de lire et d’écrire en langue française est venu avec l’Indépendance de notre Pays du joug du colonialisme. Depuis, dans  notre ville, le marocain écrit, compose des poèmes, peint des de belles toiles, monte sur les planches d’un  théâtre…

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   Je ne vous apprendrais rien en vous disant que, dans tout le reste du Maroc,  c’est à  Oujda que la première école moderne fut fondée en 1907. C’est bien sûr, l’école Sidi Ziyane. Tout le monde le sait.

   

Bien entendu, avant 1907, il y’avait plusieurs écoles coraniques qui constituaient le système éducatif local.  C’est le cas de la célèbre méderssa,de la médina, reconnaissable avec ses trois Fontaines,  accolées aux murs de la grande  Mosquée.  Al Kabir.  Ce temple de culture arabe érigée en 1298 par Al Marini est le plus ancien monument.

 Les matières enseignées dans cette medersa s’articulaient autour de la grammaire arabe, la jurisprudence, l’enseignement du Coran, l’écriture et la lecture. Les études étaient d’un bon niveau mais ne facilitaient guère l’acquisition des nouveaux savoirs, d’où l’importance à l’époque de l’apport de l’école moderne, Sidi Ziyane. Quelques années après, ce fut la création du  lycée Omar Ben Abdelaziz. Le premier lycée moderne du Maroc.

 Ceux qui se rappellent du bon vieux temps, où Oujda n’était pas encore envahie par des tribus avoisinantes savent que beaucoup d’Oujdis étaient connus dans le reste du Maroc  par  leur large facilité à baragouiner en langue française. 

 Personnellement, je n’ai pas fréquenté l’école  Sidi Ziyane, ni le  lycée Omar Ben Abdelaziz, ni aucun établissement scolaire. Le français que j’ai appris avec d’autres gamins qui vivaient comme moi dans la rue,  est devenu ma langue adoptive.

  Je me suis découvert et fait avec cette langue de manière inconsciente et directe, comme ce qui se fait tout seul. De-là à apprendre à lire et à écrire, ce fut  pour moi une longue marche… Ce fut la traversée d’une langue est une recherche de soi. Je suis toujours en marche vers cet horizon du savoir. Chaque livre que je lis, chaque discussion avec une personne  qui maîtrise cette langue que j’aime est un pas de plus.

  Si je n’ai jamais eue le plaisir de fréquenter une classe,  j’ai eu par contre l’énorme chance de côtoyer durant ma jeunesse  des hommes extraordinaires  qui m’ont orienté et guidé… des hommes qui ont changer mon destin. J’ai connu et côtoyé des  artistes peintres et des écrivains algériens et français qui m’ont marqué et sauvé de l’ignorance et  de la misère.

 

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Parmi les écrivains qui ont  vécus dans cette ville et qui furent inspirés par sa nature, sa tranquillité, son ambiance et son charme, je commence par l’Algérien  Mohamed Dib qui a écrit, entre autres, La Grande Maison,  L'Incendie, Le Métier à tisser… Ce sont des magnifiques livres cultes pour comprendre l’enfance déchirée  des petits maghrébins  et la lente prise de conscience politique du peuple algérien devant la colonisation.  

                                                           

Mohammed Dib qui a vécu très longtemps à Oujda est né à Tlemcen dans une famille ruinée. Il avait  commencé ses études dans cette capitale de la culture algérienne et les  a continuer à Oujda. Une partie de sa famille, proche ou lointaine,  réside toujours dans notre  ville.

 

Lorsque je l’ai connu, je n’étais qu’un enfant et je ne savais pas vraiment qui il était et ce qu’il allait devenir. Lui aussi, certainement.

 

Je connaissais le docteur Abrous, un pharmacien  bien connu à Oujda. Sa pharmacie est toujours à la rue Marrakech.

 

Abrous, homme cultivé et très porté sur l’art, m’aidait et m’encourager dans ma vocation. Et c’était chez Abrous que j’avais vu le futur écrivain qui était  un grand ami du pharmacien.

 

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 Mohamed Dib était  membre de l'amicale des Algériens à Oujda et il fréquentait le cercle très fermé des Français . C'étais là qu'il avait lié des amitiés avec plusieurs personnes, entre autres, Albert Bou, artiste peintre et chef de service à la municipalité.  Ce dernier avait peint des centaines de paysages d’Oujda et de Saïdia. Il était très côté dans notre ville et il vendait ses tableaux très chers.

 

Après la mort de son père, Mohamed Dib avait commencé,   à écrire des poèmes d'amour et à peindre des paysages de la ville, tout en s’inspirant des styles des  artistes locaux qu’étaient  monsieur Ayache,  Albert Bou, Albert Matherat, Madame Leprince, Mademoiselle Paco et bien d’autres encore.

 

Mohamed Dib signait ses poèmes et ses peintures sous le nom de Diabi et d’autrefois Tiabi. Mais la poésie et la peinture ne le faisaient pas gagner sa vie.

 

 

 

Pour survivre, Mohamed Dib était devenu instituteur occasionnel à Zoudj Bghel, petite bourgade algérienne  près de la frontière marocaine.  Juste après, notre future écrivain célèbre se trouva une place comme comptable à Oujda, au service des Subsistances de l'Armée française, au camp Roze, autrefois un lieu propre et admirable entouré de roses, de bougainvilliers et d’hibiscus.

 

 

 

 C’est la rencontre de Mohamed Dib avec  l’instituteur français, Roger Bellissant (qui deviendra son beau-père)  qui le conforta dans la voie de l'écriture.

 

 

A l'époque de mon enfance, il n’y avait aucun peintre musulman à ma connaissance. Le seul que je connaissais, était le père des célèbres chanteurs les "Frères Maigri", ces talentueux artistes qui ont révolutionner  la musique maghrébine.

 

Les Freres Migri           

 

 

  

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